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Quinzième volet

Voyage…

Une clef

J’ai trouvé une clef de mots
C’est comme ouvrir une porte scellée d’ombre
C’est du matin versé à même les paupières
L’air bruisselle
Etale à mes pieds des flaques de paysages
Le temps a gaufré les falaises
Feuilleté les pans de schiste noir
Dépecé les façades
Restent où marcher
Tous les chemins d’exil traversés
Je n’ai que l’embarras du choix de mes rivages

10 mai 2015

Et pourquoi non ?

Ecrire, et pourquoi non ?

La barque est immobile
Ce sont les rives qui passent
Aux arbres fromagers, badamiers
Flamboyants
Pourquoi non, le chiendent ?
Et même l’ombre oui,
Même l’ombre rayonne, vénéneuse
Epanouie
Ecrire ce qui paillette
La poussière des granges
L’éternuer
En faire des contre-feux
Des aubes de jachères, nomades
Et pourquoi non ?
Ecrire, la lune au ventre
Ces pierres dans mon jardin
 
16 février 2014

Que finisse l’hiver

Fusent la trille ronde des hulottes

des notes de gouttes chevêches
Toutes ces étoiles précipitées
ça roule comme un torrent clair
On ne sait pas ce qui paillette
du ciel qui ruisselle, orpailleur
ou la terre de sucre-givre
C’est ainsi que ma nuit chemine
en rond, dans le grand loin
Une irrévocable frontière
Mais tout finira bien par fondre
l’hiver et la neige
et les chiens
De mémoire, leurs traces de pétales
 
22 janvier 2014

Une voyelle de plume

De quel droit ce cœur me heurte-t-il si fort
de son poing le plus rage ?
Il ne fait pas le tri et ne cloisonne pas
la dureté consonne             interactive
des chaos, leur écho toxique
sur les murs
et la douceur voyelle
de ce que je sais vivre            encore
Si petite, sous les fleurs
cette boîte promise aux lèvres d’un brasier
Le reste importe peu
Le reste n’est pas valide
Si ce n’est le bleu geai
d’un message de plume
 
21 décembre 2013
Texte paru au CAPITAL DES MOTS

Insurrection

Le vent s’est enroulé autour de ma fièvre
Vois la récolte des tempêtes
Fracas à l’infini
de toutes les querelles du monde
Océan/soufre
Des digues de silences
me servent de brisants
J’attends
que la nuit lève son ancre de brume fumerolle
Insurrection de l’aube
Demain aura l’ampleur
d’une délivrance
sous la surface damée où j’ai semé les mots
(un goût de terre dans la bouche)
Demain descellera
cette chape de ciel soudé à l’horizon
 
6 décembre 2013 
Texte publié au CAPITAL DES MOTS

L’échappée cohérente (ou presque)

C’est à ça que ressemble l’eau dont nous avions soif
Serpents de moire/mirages
sur le goudron crevé
chaleur trouble de l’air
Tornades sèches
aux spirales de sable, de feuilles
de papiers gras

Une porte mal fermée
mal ouverte, je ne sais pas ?
Et s’engouffre la nuit
et avec elle, le froid
la braise vive des pierres
nos pas blessés

Une ombre amalgamée à tous mes faits et gestes
un regard collé à la serrure des mots
Ça fait comme un écho gercé
aux lèvres

Alors taire ?    

14 novembre 2013
Texte paru au CAPITAL DES MOTS

J’aimerais être sable

Ce hier déjà
Cet hiver escarpé que tu habites encore
Comme on habite un naufrage
J’aimerais être sable
Y fourmilleraient tes fissures secrètes
Tes petites peines                    lourdes
Tes pensées râpeuses
J’aimerais être sable
Le buvard absorbant de ton silence
Et comme évaporées        dessous les vagues
Dessous leurs langues
S’effaceraient tous les écueils
Tous ces pas                 qui te crochent-pattes
J’aimerais être sable
Jusqu’à rendre illisible
La trace des soleils noirs
Demain serait rivage
Apaisé
Linéaire
 
29 octobre 2013
Texte paru au CAPITAL DES MOTS  

Arrimer en pays d’automne

Musique de René Aubry : Courant d’air

Pour Valérie

Accrocher un verbe bleu aux phrases du vent
Ce pointillé de brise qui pétille
Rouge bruisse un feu de sumac
Un jardin de soleils aux rires égrainés
Des anneaux chevillés
A l’âme
D’un éboulis contenu
Arrimer en pays d’automne
Mémoire estampillée
Comme un sticker collé au front des vitres
Faire le plein de Nous
Pour jamais ce manque de ciel

22 octobre 2013

Extrait de L’or saisons aux éditions Tipaza

Septembre soir

Dimanche de septembre soir
Pas d’issues à ce paysage
Comme s’il coulait un sang atone
De mon encrier de brouillard
Plus de message à délivrer
Circulez, y a rien à voir
La ville a verrouillé l’été
Dimanche de septembre feu
Mortes, les feuilles de mon cahier
Des papiers, de ratures noircis
Et des pages blanches froissées
Plus de message à délivrer
Circulez, y a rien à dire
La ville a verrouillé les mots
Dimanche de septembre pluie
Aveugles, les vitres embuées
Eteintes, les flaques des trottoirs
Muette, l’eau de leurs reflets
Plus de message à délivrer
Circulez, y a rien à filmer
La ville a verrouillé les miroirs
Dimanche de septembre nuit
La trouée bleue d’un gyrophare
Pulse à travers l’obscurité
Les dernières mesures d’une vie
Ce qu’elle m’a donné, je l’ai pris
Y a plus rien sous les pavés
Veines de bitume taries
La ville a verrouillé mon histoire  

13 octobre 2013

Septembre soir from C. Daviles-Estinès on Vimeo.

Musique et voix : Michel Borla
Texte et vidéo : Colette Daviles-Estinès

 

 

Contre-soir

Dans l’encoignure de mes murs
un crépuscule similaire
au feu tout flamme
contre-soir
Il est des soleils rémanents
dont la lumière indélébile
longtemps affleure à la surface
Un linteau vermoulu
la photo répétée d’un sahel de dune
où mon enfant trottait
un genou, une hanche
Pendus au bleu des poutres
des chardons de poussière
et le parfum fané
d’une rose rouge
sèche  

10 octobre 2013 
Texte paru au CAPITAL DES MOTS