Quinzième volet
Voyage…
Le fil
Un fil
au bout duquel palpite un cerf-volant
Le rire d’un enfant
comme un collier de grains chapelés
tout du long
16 mai 2015
Piers
Le vent bouillonne au ras des mouettes
L’écume bat au flanc
et aux hanches des quais
15 mai 2015
Rafales
Photo de Yellow Sailboat Jean-Pierre Sillère
Rafales d’oiseaux
– leurs ailes comme des copeaux –
Pour broder ton sur ton l’horizon
Le vent est blanc dans les oyats
de sable cinglant
14 mai 2015
Peut-être
Pencher au bord du monde
Les pieds sur Toujours
Corps tendu vers Jamais
Ou inversement, peu importe
Puisque Toujours n’existe pas,
Non plus Jamais
Infinis gouffres
Même la mort
Et même la vie
Sans parois
Seulement Peut-être auquel accrocher-cœur
Il bat fort
14 mai 2015
Bonne nuit soleil
Ou encore suivre la route blanche qu’un avion a tracé dans le ciel et qui ondule comme un serpent avec le vent.
– Tu vas où, Tonton? – En Patagonie. – C’est loin? – C’est à l’autre bout du monde. Le bout du monde! Petit Kinou n’en croit pas ses oreilles. Il imagine Tonton Zouzou au bout du monde,
– Oh Tonton! Tu m’emmènes au bout du monde? – C’est impossible pour cette fois-ci, mais toi aussi un jour, tu iras au bout du monde.
Juste quand il se couche, il sera bas, tu l’attrapes dans son lit…
C’est froid, la lune.
– Mais si tu es au bord de la Terre, tu mets une échelle.
Par contre je peux peut-être attraper une étoile filante au passage. – Faut bien viser, dit Papa.
Finis ton yaourt, c’est l’heure d’aller au lit.
Il regarde le croissant de lune accroché dans le ciel et il lui vient une idée.
Il prend son épuisette et descend au jardin. Il est tellement excité qu’il n’a même pas peur du noir.
Elle passe en mille éclats par tous les trous de l’épuisette.
toutes les grenouilles de la mare.
Bouleversé, petit Kinou lâche son épuisette et court se cacher dans son lit sans même regarder le ciel.
Quand il se lève le matin, il est tout angoissé. Mais ni Papa ni Maman ne le grondent. Ils ne savent pas encore quelle énorme bêtise il vient de faire…
Elle a dû ramasser ses morceaux et partir fâchée.
C’est bientôt le crépuscule.
Petit Kinou se souvient alors du jour où il a voulu enfermer une coccinelle.
– Si tu fermes la boîte, elle ne peut pas respirer, elle va étouffer.
– J’ai cassé la lune, dit petit Kinou entre deux sanglots. Et il lui raconte comment il a cassé la lune en voulant la pêcher avec son épuisette.
Tu verras que la nuit prochaine, un croissant de lune va se lever. Et s’il est dans l’autre sens, ce n’est pas parce que tu l’auras mise
Tonton Zouzou éclate de rire.
Ecoute, petit Kinou. Je te promets que demain il fera beau. La météo a prévu un grand soleil.
– J’ai un cadeau pour toi. Je l’avais trouvé un jour, pas loin de chez moi. Et il lui tend un petit caillou tout rond et granuleux. – Ca s’appelle une météorite. C’est un vrai bout d’étoile filante.
Il s’endort avec une étoile
dans le creux de son poing fermé.
Janvier 2000
Il était une foi
Jusqu’à ce que le saisissement de la douleur s’éteigne.
Je retirais alors ma paume, j’attendais que la chaleur redevienne brûlante à nouveau et je recommençais à offrir ma peau à la morsure.
Parce que j’étais vivante et qu’elle ne l’était plus, mon amie, ma sœur.
C’était comme une offrande, un rituel.
Chaque jour d’école à 13 h 05, j’offrais ma souffrance en gage de fidélité.
Un reste de culpabilité judéo-chrétienne.
J’avais une foi toute culturelle, Dieu existait à la maison, point.
Tous les dimanches j’allais donc à l’Eglise et je priais :
– Mon Dieu, faites que je pêche une grosse daurade grise (parce que nous allions à la pêche tous les dimanches).
Ma foi était donc très infantile mais j’en avais une.
Quand j’ai perdu mon amie, ma presque sœur.
A la cérémonie d’enterrement, il faisait un soleil implacable, comme d’habitude. La chaleur était suffocante, le chagrin plus encore.
Presque toute l’école était massée là, dans l’église.
Enfants de 10 à 15 ans. Pas seulement, bien sûr, il y avait beaucoup d’adultes.
Mais je parle des enfants de l’école parce que ce jour-là, le curé a fait de nous toute une génération d’athées en prononçant cette phrase :
– Remercions Dieu d’avoir rappelé Anne-Marie à Lui.
Nous étions en train de faire l’apprentissage de notre première douleur d’adultes.
Nos jeunes fois ont craqué comme des coquilles vides sur lesquelles on marche.
A ces mots-là, tous les enfants de l’école sont sortis de l’Eglise.
Physiquement, mais pas que.
Nous avons remercié dieu.
J’ai continué à passer ma main au feu du skaï noir durant trois ans.
Puis j’ai grandi, je n’ai même plus cru à l’utilité de me punir d’être vivante.
Mais quand le soleil est particulièrement brûlant, je me souviens d’Elle, mon amie, ma sœur.
Travelling
A l’Ouest, du nouveau.
Musique de Mark Knopfler
J’aime bien que l’éclipse émiette la lumière sur la mer
J’aime bien quand la brume absorbe les éoliennes
Et le solfège des étourneaux
J’aime bien rétroviser les lampadaires
Et la géométrie fouillis des vignes
J’aime bien la mosaïque des miroirs
Et le rire de l’eau à travers les larmes de saules
J’aime bien tout ce que tu brilles
Quand le poème se propage d’une étincelle à l’autre
Sur le fil conducteur des oiseaux
7 avril 2015
Le mur tapuscrit
Billets divers patafixés
Voyages, concerts et cinéma
Mur étiqueté, tapuscrit
Histoire de croire une vie remplie
Patiences éprouvées
De sombre en sombre en ombre claire
Le dégradé d’un écho vallonné
Lumière crayeuse des carrières
Et ce bleu qui perdure dans mes retours
A la ligne – fût-elle brisée –
L’espace fine entre les mots
J’écris
J’ai cri jusqu’à la mer
3 mai 2015
Çà et là
Jamais je n’avais vu de peupliers embrasés
leur lumière propagée çà et là
comme foyers émeraude
D’ailleurs jamais
je n’avais vu les peupliers
ni çà, ni là
Seulement nos pas dans les ornières
La résurgence des sources perdues
24 avril 2015
Brève d’hiver
Avril roule un torrent trop clair
Il n’y a peut-être pas de neige
L’hiver ne fondra peut-être pas
20 avril 2015





















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