Quinzième volet
Voyage…
Méli-mélo et des brouettes
Je ne date jamais rien
mes repères sont autres
Je me souviens de la lumière le jour où
quand tu m’as dit
et cette fois-là, le vent qu’il faisait
un minaret
et l’agouti était daubé, beurk !
Si je remonte un peu plus loin
plus près d’ici
je ne sais plus, ça fait des lunes
mais le doré du soleil
les dentelles de l’épouvantail, ma Bilitis façon façon
le troupeau d’oignons alignés
Tu m’as l’air d’une bergère
On riait
et puis l’odeur de la terre sous la brume vaporisée
Je me souviens de jours comme ça
le Land Art de nos jachères
bleu horizontal phacélies
Mais ne crois pas
je ne fais que déchirer le voile
je déshabille les fenêtres
j’en ai marre de tout calfeutrer
je me défais des oripeaux
j’aère, j’exhume, je libère
Une page de ciel déchiqueté
et j’éparpille et je fracasse
les nuages, les nuages
des crépuscules recommencés
sans cesse renouvelés
sans moi, c’est tout
ni Otema
Attends, j’ai une dernière image
de Zimbabwe dans la brouette
fox dru
après j’arrête
Août 2011
Traces d’émoi
Avant de partir j’ai jeté dans le poêle
les traces de moi
ne rien laisser
c’était trop lourd à porter
je n’ai pas autodafé ma mémoire
j’aurais dû
mais j’ai brûlé beaucoup de visages, des lettres, des carnets
une bûche, des photos, une bûche
c’est fou tout ce qu’on accumule
comme projets raturés
les brouillons d’une vie
des années, des années
comme ça, en fumée
le tiroir plein de cendres
je suis désolée, j’ai presque plus rien de vous
du coup
vos cœurs gros comme ça
ça ne rentrait pas
dans mon sac
et puis je me disais qu’on recommencerait
qu’on se refabriquerait des souvenirs
ailleurs
sauf Ceux qui ne sont plus
ils ne sont plus du tout
du coup
…
Août 2011
Rosée blanche
Un chemin de pensées à la périphérie de la mémoire
comme les traces de sangliers à l’extérieur des clôtures
tout du long
Tout du long
la rosée blanche à la lisière
l’orée de l’hiver
C’était déjà de la distance
l’hiver
la rosée blanche
et la transparence parfumée
des derniers fruits
C’était de la distance
mais pas assez
pas assez loin
la bauge où fouir ce qui ne reste pas
à l’extérieur, à la lisière
à quand l’aube ?
Un chemin de pensées à la périphérie de la mémoire
comme les traces de sangliers à l’extérieur des clôtures
tout du long
19 août 2011
Extrait de L’or saisons aux éditions Tipaza
Les accus
J’ai cumulé des notes salées
A pour La
C comme Chute à plat Do
J’ai cumulé des hivers aux murs de chaux
Des nuits d’effraies l’été
Saisons de pluies des mangues âpres
J’ai cumulé des points de fuite
Transgabon, disait mon frère
fait escale à Oyem
Bitam Mitzic Makokou New-York
Et je le croyais
Tiaré/kérosène l’odeur du dernier tarmac
Je me suis nourrie de soleils culminants
J’ai bientôt épuisé mes réserves d’opales
Souvenirs iridescents irradient
Comme les ronds dans l’eau vont en s’élargissant
Mer étale
Jusqu’à quel point de non-retour
écrire me recharge ?
La nuit a passé
Je l’ai accomplie
Je l’ai contenue toute
Je m’en suis acquittée
Une nuit de plus à mon passif
Inutiles attentes incluses
La lune est pleine sur calendrier
Et le matin déjà, machinalement
S’ébruite
Août 2011
In L’or saisons aux Editions Tipaza (2018)
Faim du monde
Je rêverais un pays de vent et de plateau
Haut
Un demain d’ambre et d’argile
Modelé à l’image d’un ciel sans pliure
Viendrait le temps du sable
Le temps des pierres
Des ombres sans humanité
Mais un feu vivant de sa propre lumière
Où me réchauffer
Un silence sans murmure, sans voix
Sans écho
Déconnecté
Je n’arriverais pas au bout des chemins offerts
Mais seuls importeraient la marche et le souffle
Parce que j’aurais le temps
Le temps du sable, le temps des pierres
D’un monde je serais la mémoire et l’oubli
La seule âme qui vive
Je rêverais minérale
Et j’aurais dans les mains la sépulture de Rien
L’infini bleu
Je n’en verrais pas la faim
Août 2011
Aujourd’hui
Aujourd’hui
J’ai essayé un nouveau jour
J’ai essayé de perdre le fil
Consciencieusement
J’ai noué des trames sans liens apparents
J’ai métissé nos anciens futurs
Et ça ne ressemblait plus à rien
C’était parfait
Une plume de mouette sur le trottoir
C’était joli à ramasser
Août 2011
Il est tard tôt
Patiemment sabordée, trace subliminale
Alhen sur le sable et l’eau prémonitoire
A la première marée tout allait s’effacer
La poutre graffitée de la case de passage
Messages recueillis d’amitiés absorbées
Comme les mots disparaissent,
Comme le temps les emporte !
J’emploie mon temps à refaire surface
Pas toujours, mais le jour
Je parcours le sens unique des allées avenues
Autant d’heures de gagnées à ne pas revenir
J’abrège la mémoire des voix
Et puis la nuit
La nuit je gravite à l’intérieur de ma planète
Ça tourne comme un tambour
De machine à laver la joie
Rien ne me retient
Rien ne me délivre
Prise dans le tissage bleu cuivre des filets
Humaine géographie, la nuit
Il est toujours trop tard
Trop tôt
Juillet 2011
Les croustilles
J’entretiens un désert un océan un champ
Un chant
J’entretiens des liens
J’entretiens la brume des passerelles
Ecran de nuits platine
Je mixe avec ce que j’isole
J’isole du présent les instants qui croustillent
J’isole du présent
Ce qui me fait plaisir
Ce qui me fait sourire
Ce qui me rafraichit
Un thon Pacifique à cru de citron vert
Des papas du dimanche aux maladresses tendres
Le silence presque
Des yeux inquisiteurs cherchent à identifier
D’où vient le métronome qui me bat la poitrine
Un client du fitness pédale dans la vitrine
Le ciel des poissonniers saturé de mouettes
J’entretiens un soleil vital
Du large du large
Du loin devant
…
Bon. Faudrait juste
dynamiter la barre immeuble en face
Juin 2011
Le pont
Ce plus ailleurs encore qui efface mes pas
Le cœur qui bat en brèche
Colmater
Fissures diluées l’amour amor à mort
Une brume renouvelée
Chaque fois dissipée dans les limbes de l’aube
Partir c’est mourir et renaître plus loin
Au delà de ce pont je ne vois pas la rive
Je ne la rêve plus
Je resterai empreinte de passages oubliés
Comme dépossédée de tout ce qui nous lie
Ce plus ailleurs encore qui efface mes pas
Juin 2011
L’état d’esprit
L’inexorable est une mécanique bien huilée
rouages des soleils noirs
miroirs comme des morsures de peur déployée
l’étau et puis le souffle
le souffle et puis l’incise des jours suspendus
le ténu de la trame
entre deux pans de soirs
jusqu’à voir au travers du ciel décousu
Docteur, écoutez-moi ce coeur
mais le cardio tous les six mois ne s’y habitue pas
j’aligne des phrases-clés, des codes dérobés
j’aligne tous les sens que je peux y trouver
je tiens à ma portée la voix des cathédrales
je respire vanille
on dirait une traduction dont je m’éloigne
je voulais être encore plus approximative
je savais bien où je ne voulais pas en venir
le souffle différé plus rare que de raison
et cette douleur confidentielle
qui ne veut pas céder
Octobre 2011
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